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"A écouter le vieux roi achéen conter son retour
comme aujourd'hui on suivrait un journal de bord, il n'aura fallu
que quatre jours en effet pour que ...Nestor et son escadre atteignent
Pylos en Messénie. Soit, pour récapituler :
du port des Achéens
sur l'Hellespont à Tenedos (Bozcaada), un jour
de Tenedos à
Lesbos (Mytilène), un jour
de Lesbos au Géreste
(pointe sud de l'Eubée), un jour et une nuit
du Géreste
par le cap Sounion à Argos (golfe de Nauplie), un jour
du golfe de Nauplie
par le Cap Malée à Pylos, un jour
Ce "journal de bord" oral du sage Nestor résonnait,
aux oreilles des auditeurs du poème, ses premiers destinataires,
comme une séquence d'instructions nautiques : le modèle
des dispositions à prendre pour la traversée de l'Egée
du nord-est au sud-ouest en route directe, la liste des amers à
reconnaître et la durée prévisible des traites
entre les escales successives. Pour qui en prend aujourd'hui connaissance
à la lecture de l'Odyssée, ce texte livre, en outre,
une indiscutable information : les capitaines des temps homériques
et, bien avant eux probablement, les capitaines des temps mycéniens
avaient la pleine capacité, quand l'opportunité s'en
présentait, de se lancer dans des traversées en haute
mer, et de nuit. Ils n'hésitaient pas à faire ce choix
délibérément, dès lors que les signes
du ciel leur annonçaient des conditions favorables".
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Jean Cuisenier, Le Périple d’Ulysse, pp. 186-188
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